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France : Fin d’un mouvement, explosion de colère

Oct 21, 2023Oct 21, 2023

Le 27 juin 2023, quelques semaines seulement après la dernière des manifestations géantes contre la « réforme » du système des retraites, la société française a connu une puissante explosion de révolte des jeunes qui engloutit tout le pays pendant plusieurs jours. Elle a été déclenchée par l'assassinat par la police de Nahel Merzouk, dix-sept ans, qui conduisait une voiture sans permis dans une banlieue parisienne. Il a été tué lors d'un contrôle policier, d'une balle dans le cœur. Comment est-on passé d’un mouvement de grande ampleur contre une « réforme » gouvernementale visant à ajouter deux ans à l’âge minimum de la retraite et destinée à accroître la paupérisation des retraités, à une explosion contre les violences policières ?

Il faut commencer par revenir sur la fin brutale du mouvement contre la « réforme ».1 Après une série de manifestations convoquées par les syndicats, après une multiplication des grèves qui ne parvinrent pas à s'étendre ni à augmenter leur durée, les perspectives de les luttes étaient de plus en plus réduites. La lassitude et la lassitude ont finalement pris le dessus, accompagnées d'un sentiment d'impuissance à modifier l'équilibre des pouvoirs en faveur d'un gouvernement soutenu par les forces capitalistes et les secteurs aisés de la société. Les grèves, bien qu’impliquant des travailleurs actifs et déterminés, ne se sont jamais généralisées au point de bloquer le fonctionnement de la société. Les manifestations répétées, l'énergie et la créativité des manifestants, le recours aux blocages et au sabotage, la formation de réseaux de collectifs de lutte, les liens tissés entre étudiants et ouvriers, la sympathie de la majorité de la classe ouvrière, tout cela n'a pas suffi. pour entretenir la dynamique et permettre de passer à un niveau de lutte plus offensif. Bien que très populaire, le mouvement actif reste l’effort d’une minorité. Les manifestations successives n'ont fait que révéler aux yeux des participants l'impasse que les forces syndicales cherchaient de plus en plus à cacher par des discours triomphalistes, une démagogie irritante. Le mouvement était finalement épuisé et l’activisme des minorités ne pouvait rien y faire.

La fin nette du mouvement n’a pas effacé la conscience collective avec un rejet profond et massif de la ligne néolibérale du capitalisme actuel et de ses modes de gouvernement de plus en plus autoritaires. Ce rejet n’a pas réussi à trouver sa voie pour devenir une force d’opposition décisive. Le rejet qu’il a exprimé est donc toujours là, la défaite n’a donc pas été vécue comme la défaite du collectif et de son énergie subversive. Le sentiment général est résumé par une phrase avec des accents et des nuances différentes : « Nous avons perdu mais eux n'ont pas gagné. Le combat recommencera tôt ou tard.

Ce dégoût de la classe politique et de ses propagandistes, avec la répression croissante de toutes les formes d'opposition, avec le mal-être général, l'appauvrissement social et les inégalités de classe croissantes ont fourni un contexte à l'explosion de la révolte contre les violences policières parmi les jeunes des quartiers populaires. . Il s’agit d’une violence raciste vécue quotidiennement dans les quartiers qui abritent des jeunes, pauvres et pour la plupart exclus du monde du travail et de la vie sociale en général, qui, bien que issus de l’immigration, sont souvent « français ». depuis une ou deux générations. La violence policière et sa dimension raciste ont une longue histoire en France, avec des racines profondes dans les conflits de classes marquant l'origine du capitalisme industriel en France et dans la répression des groupes successifs d'immigrés qui ont longtemps composé la classe ouvrière. A cela s’ajoutent les conséquences d’un héritage colonial mal digéré et des rébellions nationalistes de l’après-guerre. Plus récemment, la répression policière est revenue sur le devant de la vie sociale avec le mouvement des Gilets Jaunes, dont plus de 3 000 ont été blessés et mutilés par la police. Elle s’étend désormais à toutes les formes d’opposition à l’ordre social, y compris les luttes contre la destruction de l’environnement. Ceux-ci ont été systématiquement criminalisés et confrontés par la police. Ce fut notamment le cas récemment à Sainte-Soline, dans le centre-ouest de la France, où 30 000 personnes, mobilisées pour bloquer un projet agro-industriel de privatisation des ressources en eau, se sont heurtées à des forces de police militarisées qui ont fait des dizaines de blessés et fait deux morts. des jeunes dans un état critique.